La fin de la saison des pluies coïncidant avec le début des récoltes sont des périodes cruciales au Niger en général, et dans la région de Zinder en particulier en raison des conflits qui opposent les agriculteurs et les éleveurs. Zone agropastorale par excellence, la région de Zinder regorge un important potentiel des terres agricoles et du cheptel. En effet, la cohabitation entre les deux couches essentielles du monde rural est souvent marquée par des affrontements conduisant à des pertes matérielles, des blessés et des pertes en vies humaines. Des dispositions sont prises pour prévenir et gérer d’éventuels conflits aux conséquences fâcheuses.
Le Niger s’est doté d’un instrument juridique en vue de prévenir et de contenir efficacement les conflits pouvant remettre en cause la quiétude sociale. Le code rural a prévu des cadres et des moyens à travers lequel chaque acteur peut s’exercer librement. Le monde rual fait face aux défis agropastoraux qui sont des secteurs stratégiques pour le pays. Compte tenu des conséquences socioéconomiques, politiques et culturelles qui sapent l’harmonie et le vivre ensemble, les acteurs se retrouvent chaque année pour discuter et échanger s’agissant les mesures à prendre en vue de prévenir d’éventuels conflits.
Sources du conflit
Le conflit survient lorsque les animaux en pâturage envahissent le champ avant ou pendant les récoltes et anéantissent tous les efforts du paysan ayant consenti toutes ses énergies tout au long de l’année. Constatant les dégâts orchestrés par les éleveurs en pâturage, l’agriculteur devient souvent insensible face aux catastrophes. Ainsi, sa réaction devient imminente et les conséquences sont désastreuses. Le code rural nigérien a, pourtant défini la période de libération des champs afin de permettre aux éleveurs de profiter des résidus des cultures. Pourtant, le pâturage est bénéfique pour les agriculteurs du fait que les excréments d’animaux sont des apports organiques au sol. La complémentarité existante entre les deux parties semble disparaitre en raison de facteur d’ordre démographique, pluvial, et économique, car les agriculteurs ne laissent guère les pasteurs bénéficier des éléments vitaux pour le bétail. Or, le passage des animaux laissent des traces indéniables dans les champs de par son apport organique et chimique.
Précisons aussi que les conflits interviennent généralement lorsque les agriculteurs surprennent les animaux dans les champs et tentent de vouloir les garder. Ce qui suscite la réaction des éleveurs. Face à cela « nous, nous privilégions la médiation en faisant appel à tous les acteurs à savoir les autorités locales, les responsables du code rural, les OSC et les concernés pour que des solutions appropriées soient trouvées. Nous avons toujours obtenu des résultats probants" explique M. Siddo Amadou Président de la Fédération Nationale des Éleveurs du Niger FNEN Daddo
Selon le Chef de Groupement Peulhs Hadi Gourgoudou, ancien cadre du Ministère de l'élevage, les véritables préoccupations chaque année sont celles qui entrainent la descente de leurs animaux et ceux des autres se trouvant en majorité en zones pastorales et en zones intermédiaires. Ce mouvement est perçu comme une réelle menace. Il a par ailleurs souligné que cette période consiste au stockage des produits des récoltes. En outre, il a indiqué que le délai accordé à la collecte et au stockage des différentes denrées est souvent insuffisant
L’implication : des acteurs locaux une solution pour prévenir les conflits
Au niveau de la zone agricole et pastorale de la Commune de Kellé, les éleveurs en pâturage dans les champs relèvent essentiellement de la localité. Qaunt aux transhumants ils ont déjà pour la plupart effectué leur passage sans aucun problème majeur. « Les dégâts que nous avons enregistré sont négligeable. Après l’intervention des propriétaires des champs, les éleveurs quittent les lieux sans quelconque résistance. Nous mettons en avant la sensibilisation pour prévenir les conflits" indique Elh Adam Moussa Maire de la Commune rurale de Kellé.
En ce qui concerne la zone nomade et pastorale de Belbeji, les agriculteurs ont déjà terminé les travaux champêtres et presque finis la collecte des récoltes destinées au stockage. Ils attendent seulement les dates butoirs de libération des champs en vue de respecter les règles en vigueur pour permettre aux éleveurs d’accéder aux champs et profité des résidus des tiges des céréales et autres.
Les populations des localités de Batté à Kounar Daga se réjouissent de l’absence des éleveurs dans leurs zones respectives jusqu’à la libération de champs. Pour dire que le mécanisme mis en place pour prévenir les conflits est en train de produire des effets positifs pour le bien-être de tous a martelé M. Harouna Leko. Pour sa part M. Saidou Ibrahim agriculteur du village de Mai Taba Belbéji, il précise que chaque année, ils privilégient le dialogue pour contenir et endiguer le problème en cas de descente précoce des pasteurs du Nord au Sud à la recherche des fourrages. Il s’est agi d’un système de dialogue mis en œuvre afin de prévenir efficacement des actes incompréhensif pouvant conduire à l’affrontement.
Contribution des autorités administratives et coutumières pour accompagner les actions de conciliation entre agriculteurs et éleveurs.
Les autorités coutumières jouent un rôle prépondérant en matière de gestion des conflits entre les agriculteurs et les éleveurs à travers le conseil qu’ils apportent. Ils interviennent entre autres en procédant à la vulgarisation du code rural qui est un instrument de référence dans le cadre de gestion du conflit foncier. Le code rural a prévu de dispositions sur lesquelles s’appuient les autorités coutumières pour prodiguer des sages conseils aux parties prenantes.
Ajoutons aussi que les autorités administratives apportent son soutien quant à l’application et le respect du code rural en vigueur. Conscientes de l’importance de vivre ensemble, les autorités administratives s’investissent pouSalam 96293393 PR ILLOU MAHAMADOU Danferlleure manière de gérer une crise, est de la prévenir. Des missions de campagnes de sensibilisation sont déployées tant sur les plans régional, départemental que communal. Les messages transmis sont rassurants du fait que les éleveurs sont édifiés en ce qui concerne les principes qui régissent la libération des champs et la descente des animaux du Nord au Sud. Les agriculteurs acceptent également la période indiquée pour céder l’espace de pâturage aux pasteurs. Ancien cadre du Ministère de l’Elevage de son Etat, le Chef de Groupement Pulhs M. Hadi Gourgoudou fait partie des personnalités impliquées dans le cadre des missions de sensibilisation connaissant l’intérêt que revêt la cohésion entre les agriculteurs et les éleveurs.
Convaincu de son rôle du chef Coutumier le Chef de canton de Tarka Belbeji Alhadar Samro Algabit a personnellement entrepris une campagne de sensibilisation, en plus de celle effectuée par le préfet et le maire de la commune. Il est engagé à œuvrer pour la quiétude sociale et la paix dans sa localité. C’est pourquoi, il poursuit la sensibilisation à l’endroit des couches sociales concernées connaissant que la prospérité de son entité dépend du concours de toutes les populations. Au cours des séances de sensibilisation, Lpréfet et le Chef du Canton de Belbeji ont informé les éleveurs que le 31 Décembre 2023 est la date retenue de libération des champs. Comprenant l’importance du message des autorités administratives et coutumières, les éleveurs sont à pied d’œuvre pour éviter d’éventuelle invasion des champs par leur bétail lors de la descente.
Nonobstant les efforts des autorités, le village de Dan kandé dans la localité de Belbeji a connu un cas mineur ayant opposé agriculteurs et éleveurs. Cela a suscité une prompte intervention du préfet qui a sensibilisé les populations concernées pour endiguer le problème.
Certes, l’Etat a adopté le code rural, il est impérieux d’œuvrer pour que les dispositions prises soient respectées par tous et par toutes. Les autorités doivent à cet effet, renforcer le mécanisme de prévention et la conciliation doit être la pierre angulaire pour que les conflits entre agriculteurs et éleveurs ne conduisent plus au désastre dans l’intérêt suprême du pays.
Cet article a été réalisé par M. Magagi Manzo Mahaman Moutari dans le cadre de la formation des journalistes sur le Journalisme sensible aux Conflits par le Cadre de Réflexion pour la Paix et la Sécurité au Sahel (CRPS)