Putschs en Afrique : Le printemps des antidémocrates
La situation sécuritaire justifiant le réceptacle du retour des militaires au pouvoir, est une manœuvre de sape contre la démocratie (certes pleine d’imperfection), mais offrant des garanties pour les citoyens dans une république. La gouvernance démocratique est une quête de perfection comme d’ailleurs toute organisation sociopolitique qui s’affirme à travers des expériences, des actions systémiques. Les premiers défis des démocraties étaient les régimes qu’elles ont remplacés, secondés par les revendications des travailleurs et des scolaires dans les pays ouest africains par exemples. La résistance on ne peut plus insidieuse, est celle des antidémocrates, des acteurs politiques qui se sont vus obligés de troquer à leur corps défendant leur robe des militants et sympathisants des régimes d’exceptions contre celle des démocrates.
Si les contradictions sociales dans une démocratie doivent aboutir au putsch que dirions-nous de la crise des gilets jaunes en France ? Que dirions-nous des attaques terroristes et leurs cortèges des morts dans les capitales européennes ? Il faut une certaine opinion même avertie en Afrique au sud de Sahara pour réclamer l’interruption de la démocratie. Ceux-là qui nourrissent l’assertion du président français quand en son temps il disait que « le multipartisme est une sorte de luxe que ces pays en voie de développement n’ont pas les moyens de s’offrir », Jacques Chirac 1990.
La manifestation la plus éloquente de ces antidémocrates qui se couvrent de robes de démocrates, est leurs incessantes invites aux interruptions des régimes démocratiquement mis en place à chaque fois qu’ils perdent les élections. La fenêtre est vite trouvée à travers le soutien aux putschistes. Le constat est clair. La cartographie est facile dans nos pays, il suffit qu’on s’y attarde sur les interventions et les réactions des citoyens et acteurs publics sur les médias et les sociaux.
Des dirigeants des formations politiques, des acteurs de la société civile qui s’affichent et jubilent lorsqu’ils y a des coup-d’Etat même dans les pays voisins. Cela dénote de tout sauf un état d’esprit républicain et démocratique, celui d’un citoyen d’un Etat des droits qui promeut la liberté d’expression.
Estimant vaincre les démons de la résistance entretenus par les acteurs des partis uniques (régimes d’exceptions) et les exclus de la bataille des démocrates, les démocraties africaines se nourrissent des turpitudes et autres contradictions internes, dénominateur commun de la classe politique dans beaucoup des pays africains. Loin de grandir dans cette dialectique, la démocratie est trahie par ses propres acteurs, insensibles et réfracteurs aux changements qu’elle impose : la loi des gagnants et des perdants au rythme des mandats électifs.
Comment applaudir quand ceux, qui ont le pouvoir régalien, de lutter contre l’agression extérieure prennent la poudre d’escampette face à la moindre adversité sur le terrain et confondent leur mission souveraine à celle de la déstabilisation de la république ? Comment louer le courage de celui qui achève le travail des terroristes, celui de désintégrer le régime démocratique et républicain ? Eh bien, il faut être un antidémocrate, dépourvu de toute culture démocratique pour avoir cette attitude. Heureusement, il y’a et il y’aura toujours des esprits éclairés et murement républicains pour s’y opposer!
Le travail des démocraties reste celui de « la construction d’une armée au service de la démocratie » qui passe par une véritable refonte de l’institution militaire dans son organisation et fonctionnement internes.
Un débat qui a fait bouger d’experts dans ce domaine. « La normalisation du couple « armée et démocratie » passe par la consolidation de la culture démocratique mais aussi par la construction d’une armée au service de la démocratie. Pour se faire, l’armée doit être considérée comme une entité institutionnelle comme une autre, comme un microcosme social en lien avec la société. C’est-à-dire un système social et idéologique complexe lié par des discours, des pratiques, des sociabilités, et qui prend part, comme d’autres institutions, à la mise en place et à la défense d’un ordre et de solidarités dans le cadre d’un processus de construction du politique » (Hutchul, 1989)).