Hebdomadaire Nigérien d'Analyses et d'Informations Générales

 marche pour le climat

                                                                           Marche des étudiants en faveur du climat à New York

Les récentes victoires électorales des partis de gauche en France et au Royaume-Uni pourraient annoncer une nouvelle ère pour les politiques climatiques en Europe. Le nouveau gouvernement travailliste britannique a des projets ambitieux pour développer les capacités en matière d'énergies renouvelables et, même si la formation de coalitions reste délicate, l'extrême droite climato-sceptique a été contrecarrée en France.


Il faut espérer que cet élan se poursuivra lors de la réunion ministérielle du G20 qui se tiendra à Rio de Janeiro le 24 juillet. Les pays riches y examineront la proposition novatrice du Brésil d'instaurer un impôt annuel minimum de 2 % sur la fortune des milliardaires du monde entier. Cet impôt, ainsi que les nouveaux instruments de financement de la lutte contre le changement climatique qui devraient être annoncés, pourraient soutenir les investissements dans la croissance verte, l'adaptation au changement climatique et les mesures visant à lutter contre les inégalités au sein des pays.
Mais les nouveaux instruments d'investissement ne suffiront pas. Comme l'a montré notre expérience avec le Covid-19, les approches purement axées sur le marché ne suffisent pas à lutter contre une pandémie, pas plus qu'elles ne peuvent aider à contrer la destruction de l'environnement ou l'écart de richesse qui se creuse dans le monde. Même les pays riches commencent à s'éloigner de l'orthodoxie néolibérale de la privatisation et de la déréglementation. Mais tant que les pays en développement resteront paralysés par les anciennes règles, ils auront du mal à développer leurs propres modèles économiques et à façonner leur propre destin. 

Alors que les défenseurs occidentaux du libre-échange dénonçaient le recours par la Chine au protectionnisme et aux subventions pour favoriser les secteurs stratégiques, ces pratiques sont aujourd'hui de rigueur dans les économies avancées. Les États-Unis injectent des dizaines de milliards de dollars dans la fabrication nationale de véhicules électriques et de batteries par le biais de la loi sur la réduction de l'inflation (Inflation Reduction Act), utilisant l'État pour stimuler l'investissement et la création d'emplois dans les secteurs verts. Mais la lutte contre le changement climatique est un combat mondial, et les règles du commerce international ne permettent généralement pas aux pays en développement de stimuler leurs propres industries de cette manière. Par exemple, l'Indonésie, leader mondial dans le domaine du nickel, un métal essentiel pour les batteries des véhicules électriques, a été sanctionnée par l'Organisation mondiale du commerce pour avoir poursuivi une stratégie industrielle.
Ainsi, alors que les prescriptions politiques néolibérales tombent en disgrâce dans les économies développées, elles sont reconditionnées dans des boîtes vertes pour les économies moins riches. Les décideurs politiques des pays à revenu élevé peuvent s'appuyer sur des leviers de politique industrielle coûteux, tels que les incitations fiscales et les garanties de prêt, alors que les pays en développement n'ont pas ce luxe. Ils doivent trouver le moyen de créer des emplois, de réduire les inégalités et de décarboner leurs économies avec un ensemble d'outils et une capacité technologique beaucoup plus limités.
En outre, les pays riches poussent les pays en développement à se convertirvers les énergies renouvelables à un rythme irréaliste. Ils ne reconnaissent pas la nécessité pour les pays en développement de garder une utilisation limitée des combustibles fossiles à court terme, ni le fait que des règles commerciales injustes limitent l'accès des pays pauvres à des technologies vertes abordables et à des capitaux bon marché. Cette politique de deux poids, deux mesures est révélatrice des mêmes déséquilibres observés ces dernières années lorsque les pays les plus riches se sont accaparé les vaccins, réduit les budgets d'aide et n'ont pas tenu leurs promesses en matière de financement de la lutte contre le changement climatique.
Cette hypocrisie n'est pas passée inaperçue. Les populistes autoritaires tels que l'ancien président brésilien Jair Bolsonaro, le président argentin Javier Milei et le président turc Recep Tayyip Erdoğan ont chacun promu le récit selon lequel les politiques climatiques nuisent à la croissance économique. C'est peut-être vrai dans de nombreux cas, mais uniquement en raison des compromis imposés par les politiques néolibérales.
Si les pays en développement pouvaient définir leurs propres politiques, les investissements climatiques favoriseraient la création d'emplois et la croissance inclusive. Les gouvernements à qui l'on demande de rendre leurs économies plus vertes ont besoin de financements flexibles à des taux concessionnels. Ils bénéficieraient également de régimes fiscaux nationaux et internationaux progressifs qui s'appuieraient sur des succès récents tels que la Convention fiscale des Nations unies, un effort mené par les pays en développement pour démocratiser les règles fiscales et en soustraire le contrôle à des instances fermées comme l'OCDE.
L'essoufflement du néolibéralisme donne aux économies émergentes et en développement l'occasion de coopérer à la conception d'un nouveau paradigme. En concevant des modèles dirigés par l'État qui lient les stratégies vertes au développement socio-économique, elles peuvent protéger l'agenda climatique contre les attaques d'opportunistes autoritaires. Tout comme il existe différents types de capitalisme, il existe différentes voies vers le développement vert.
Prenons l'exemple du Mexique, une puissance industrielle et un producteur de pétrole qui vient d'élire une climatologue, Claudia Sheinbaum, à la présidence. Son administration entend investir 13,6 milliards de dollars dans les énergies renouvelables, avec pour objectif de satisfaire 50 % de la demande d'électricité grâce à des sources sans carbone d'ici à 2030. S'ils sont bien menés, ces efforts devraient favoriser la création d'emplois et réduire les inégalités, les entreprises publiques étant mises à contribution pour soutenir le déploiement des technologies vertes. L'annonce encourageante d'un nouveau ministère chargé de la science et de l'innovation pourrait également soutenir le développement de l'industrie manufacturière de pointe et des industries de haute technologie.
Le Brésil est également bien placé pour être le pionnier des politiques vertes parmi les pays en développement. Libérée du pouvoir déstabilisant de Bolsonaro, le président Luiz Inácio Lula da Silva met l'accent sur le développement durable et la réforme fiscale. S'il parvient à coordonner efficacement sa politique industrielle, ses objectifs en matière d'infrastructures et ses initiatives vertes telles que le plan de transformation écologique, il pourrait mettre en œuvre un solide programme de croissance verte dans son pays, tout en étendant son influence régionale et mondiale en tant qu'hôte de la réunion du G20 de ce mois-ci et de la conférence des Nations unies sur le changement climatique (COP30) de l'année prochaine.
Nous pouvons construire un nouveau monde de justice climatique et d'équité sociale sur les ruines du néolibéralisme. Pour y parvenir, nous avons besoin de nouvelles structures économiques qui soient informées, activement façonnées et maintenues par les pays à faible et moyen revenu. Un ordre mondial plus juste nécessite des États plus robustes et proactifs, capables de concevoir et de mettre en œuvre des politiques visant à stimuler la croissance économique, la création d'emplois, la réduction des inégalités et la décarbonisation.
Laura Carvalho, directrice de la prospérité économique et climatique à l'Open Society Foundations, est professeure associée d'économie à l'université de São Paulo.
Copyright : Project Syndicate, 2024.
www.project-syndicate.org

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