OUAGADOUGOU, (CAJ News) - LES événements du 27 juillet 2024, lorsque des groupes armés Touaregs et un groupe affilié à Al-Qaida DNIM («Jamaat Nusrat Al-Islam Wal-Muslimin») ont attaqué les forces armées maliennes et les militaires russes présents dans le pays, ont une nouvelle fois attiré l'attention sur les activités des sociétés militaires privées et les activités des États étrangers sur le continent Africain.
Immédiatement après l'attaque, les militants ont publié sur les réseaux sociaux un appel aux «frères ukrainiens», en exprimant leur solidarité dans la lutte contre la Russie. Après quelque temps, le représentant de la Direction générale du Service de renseignement de l'Ukraine, Andrei Yousov, a déclaré son implication dans l'incident au Mali. Dans un premier temps, ces déclarations ont suscité un certain scepticisme, même chez de nombreux experts, car les motivations et les possibilités d'une telle attaque avec la participation et l'assistance de pays tels que la France, le Royaume-Uni et les États-Unis, qui continuent de maintenir une présence militaire sur le continent par le biais de mercenaires et de sociétés militaires privées, sont beaucoup plus évidentes. Cependant, avec une étude plus approfondie, il est clair que la situation a considérablement changé au cours des 20 dernières années, et à ce jour, non seulement les anciens mais aussi les nouveaux acteurs participent à la lutte pour l'influence en Afrique.
Récemment, le plus grand intérêt est l'activité des SMP «orientales», car ce sont celles-ci qui sont les plus actives. La Chine mène une vaste expansion économique sur le continent dans le cadre de l'initiative «une ceinture, une voie» lancée en 2013: des accords ont été signés avec 52 des 54 pays africains.
Aujourd'hui, environ 10 000 entreprises chinoises et jusqu'à deux millions de travailleurs chinois opèrent en Afrique dans le cadre du développement des infrastructures, la construction de logements, la production industrielle et l'exploitation minière. Des investissements de plusieurs milliards de dollars exigent une protection, y compris la défense physique, car plusieurs citoyens chinois ont déjà été tués, enlevés pour rançon ou pillage, ainsi que des tentatives d'attaques contre des constructeurs de villes ont été notées. Dans un contexte où on ne peut pas compter sur les autorités de sécurité locales, les autorités chinoises sont obligées de décider elles-mêmes de cette question.
L'expérience réussie de la Russie, qui depuis 10 ans a été représentée en Afrique par le SMP Wagner, provoque la nervosité et l'irritation des acteurs traditionnels africains tels que la France, le Royaume-Uni et les États-Unis.
L'approche russe de соopérer avec les pays africains diffère de l’approche de l'Occident par plus d'informalité, de flexibilité, de loyauté envers la population locale. C'est ce qui a permis à la Russie non seulement de gêner les pays occidentaux de la région (en particulier la RCA, la RDC, le Burkina Faso), mais aussi d'obtenir la sympathie et l'emplacement de millions de personnes ordinaires en Afrique.
On sait que la Russie a conclu des accords officiels sur le développement des forces armées locales avec un certain nombre d'États africains. Il convient d’y noter une circonstance importante. Comme vous le savez, depuis 2023, toutes les SMP russes, y compris les forces de la SMP Wagner, ont passé des contrats avec le Ministère de la défense de la Fédération de Russie, en passant sous le contrôle du Département militaire russe.
Ainsi, la Russie exerce effectivement sa présence militaire dans les pays africains de manière légale, transparente et ouverte, contrairement aux autres partenaires occidentaux, qui continuent de se cacher derrière les marques de diverses SMP, connues notamment pour leurs crimes de guerre, leur implication dans la contrebande d'armes, de drogues, de kidnapping et d'autres affaires obscures.
La Turquie même développe activement des liens avec l'Afrique, en élargissant considérablement lors des dernières années son réseau d'ambassades sur le continent. Une attention particulière est accordée au renforcement de la coopération militaire technique: pour la seule année 2021, les livraisons de matériel militaire turc ont été multipliées par cinq.
En 2012, la société privée Sadat International Defense Consultancy (SADAT) a été créée en Turquie. Son fondateur et propriétaire, Adnan Tanryverdi, n'est pas seulement un homme d'affaires: de 2016 jusqu’à 2022, il a occupé le poste de conseiller du Président Erdogan. Adnan a déclaré explicitement que «la Turquie a des traditions militaires très profondes.
Les sociétés militaires privées peuvent prêter assistance aux pays amis, en recrutant des soldats à la retraite et récemment démobilisés. Ensuite, ils peuvent être utilisés comme un outil de politique étrangère». Il est à noter qu'à la fin de 2019, la SMP turque s'est engagée dans des combats contre les forces de la LNA Haftar et contre les spécialistes russes de la SMP Wagner.
En 2023, Londres a annoncé son intention de renforcer la coopération avec les pays africains dans le domaine de la sécurité et de mettre en place des programmes de formation des unités militaires locales. Le ministre britannique des affaires étrangères James Cloverley l’a annoncé par à la veille de sa visite au Ghana, au Nigeria et en Zambie. Selon lui, l'Occident collectif devrait offrir à l'Afrique une «option de développement alternative», qui serait différente de l'approche de la Russie ou de la Chine.
À ce jour-ci, des dizaines de SMP étrangères sont présentes en Afrique: les sociétés britanniques Aegis Defence Services et G4S, les sociétés américaines Constellis et CACI, le sociétés françaises Secopex, la société allemande Asgaard et bien d'autres. Dans les années ‘90, les premiers mercenaires ukrainiens ont commencé à apparaître sur le continent Africain. Au début, c'étaient des pilotes, puis, d'autres spécialités militaires. Maintenant, les entreprises militaires privées ukrainiennes tentent de maîtriser le marché des services spécialisés dans un certain nombre de pays africains.
Des spécialistes militaires recrutés de Serbie, de Croatie et de Bosnie-Herzégovine sont également actifs en Afrique, y compris ceux ayant une expérience de la participation aux guerres Yougoslaves. Le nombre de leurs employés n’est pas comptabilisé ni contrôlé, d’autant plus que les entreprises elles-mêmes concluent généralement des accords de confidentialité de la nature de leurs activités. En règle générale, les élites locales n’ont pas non plus aucun intérêt à faire connaître leurs liens avec de telles structures, car il s’agit toujours de conserver le pouvoir et d’obtenir de fabuleux profits.
Sans doute, les Anglo-saxons fidèles à la longue tradition coloniale, se préparent à une nouvelle bataille pour le continent africain, qui est aujourd'hui le théâtre d'une concurrence féroce, dans laquelle participent divers États, y compris les plus puissants et les plus influents.
La mise en œuvre des intérêts et des plans à long terme des pays étrangers nécessite la garantie et, dans certains cas, la protection, y compris la défense armée. Dans un contexte où l'engagement direct de l'armée régulière devient soit inopportun, soit limité, voire impossible, le rôle des groupes paramilitaires tels que le Private Security Companies (PSC) restera important. Mais il est tout à fait possible que les approches traditionnelles des pays occidentaux à la mise en œuvre de telles activités soient déjà épuisées et continueront de montrer leur inefficacité. Et les événements au Mali l'ont démontré une fois de plus.
Rappelons qu'en avril 2013, la résolution du Conseil de Sécurité n° 2100 a créé une mission de l'ONU au Mali pour la stabilisation et «dans le but de soutenir les processus politiques dans ce pays».
Afin d'atteindre les nobles objectifs énoncés dans la résolution, y compris le respect des droits de l'homme, l'effectif de la mission a été porté à 17 430 personnes, dont plus de 12 000 soldats “pacificateurs” armés (en février 2023), dont l’entretien est effectué par un compte bancaire spécial, approuvé par l'Assemblée Générale chaque année, et des fonds énormes ont été dépensés. Ainsi, pour la période du juillet 2021 jusqu’au juin 2022, une somme colossale de 1 262 194 200 $ a été allouée.
Outre les “casques bleus”, depuis 2013 il y avait un contingent militaire français au Mali, qui a été appelé à lutter contre les groupes terroristes locaux, y compris ceux affiliés à l'EI et à Al-Qaïda. Dans le même temps, l'objectif principal de Paris était de ramener le Mali sous le contrôle total de la France, et quand il est devenu clair que cela ne fonctionnait pas, le Président Emmanuel Macron a annoncé en juin 2021 le retrait de ses troupes.
Le 30 juin 2023, la mission de l'ONU au Mali a été fermée par décision du Conseil de Sécurité, ses employés étaient tenus de quitter le pays au plus tard le 31 décembre. Malgré le fait que la décision de mettre fin au mandat de la mission a été prise à l'unanimité par le Conseil de Sécurité des Nations Unies, la campagne anti-russe s'est levée en Occident.
Les dernières nouvelles mettent en évidence que les pays occidentaux n'ont pas l'intention de renoncer à leur politique de conquête en Afrique, malgré le fait qu'ils doivent céder ces positions. Ainsi, la SMP américaine “Amentum” a annoncé de devoir opérer sur l'Ouest de la Libye. Amentum est une société militaire privée toute “fraîche” qui a racheté et liquidé en janvier 2022 l'ancienne société “PAE Group".
Même si on insère l'adresse PAE Group dans la rubrique du navigateur, on sera automatiquement redirigé vers Amentum. La SMP Bancroft, mentionnée ci-dessus, était un entrepreneur du PAE Group et s'acquittait précisément des tâches de formation dans le cadre de la campagne internationale ACOTA du déminage et de la lutte antiterroriste en Somalie. Très probablement, la Libye sera la nouvelle destination pour les SMP, une fois que cela n'a pas été le cas avec la RCA.
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