Hebdomadaire Nigérien d'Analyses et d'Informations Générales

Selon l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) une personne handicapée est“ toute personne dont l’intégrité physique ou mentale est passagèrement ou définitivement diminuée, soit congénitalement, soit sous l’effet de l’âge ou d’un accident, en sorte que son autonomie, son aptitude à fréquenter l’école ou à occuper un emploi s’en trouvent compromises”. Les personnes handicapées représentent 15% de la population mondiale dont 80% dans vivent dans les pays en développement souligne le rapport mondial sur le handicap 2018. Ils sont plus d’un milliard dont 20% d’entre elles vivent avec de grandes difficultés fonctionnelles au quotidien. Au Niger, les résultats du Recensement Général de la Population et de l’Habitat (RGP/H de 2012) chiffrent l’effectif des personnes handicapées à 715.476 personnes, soit 4,2% de la population générale. Plus de 60% d’entre elles ont moins de 20 ans. Les moins de 30 ans représentent près de 75%. Ce qui dénote de la jeunesse des personnes affectées par un handicap dans notre pays. Les personnes handicapées ont dans l’ensemble un accès limité à l’eau et à l’électricité en relation avec leurs conditions de vie, particulièrement en milieu rural.

 

D’après les statistiques, 83,8% vivent dans les zones rurales contre 16,2% en milieu urbain. Elles sont victimes d’autres inégalités et discriminations sociales. «Aujourd’hui encore, l’écrasante majorité des personnes handicapées survivent grâce à la mendicité. La situation est plus critique pour les personnes vivant avec des handicaps lourds et celles âgées sans soutien. Beaucoup de familles utilisent les enfants handicapés pour arrondir leurs revenus à travers la mendicité, les privant ainsi de leurs droits à l’éducation et à la formation», note le Rapport alternatif sur la mise en œuvre de l’Agenda 2030 au Niger (FNPH, février 2018). Ce, malgré l’adoption et la ratification par notre pays de plusieurs instruments juridiques nationaux et internationaux visant la promotion de l’égalité entre tous les citoyens. L’article 22 de la Constitution du 25 novembre 2010 est édifiant à ce sujet. Il stipule : «L'Etat veille à l'élimination de toute forme de discrimination à l'égard de la femme, de la jeune fille et des personnes handicapées. Les politiques publiques dans tous les domaines assurent leur plein épanouissement et leur participation au développement national. L'Etat prend, en outre, les mesures de lutte contre les violences faites aux femmes et aux enfants dans la vie publique et privée. Il leur assure une représentation équitable dans les institutions publiques, à travers la politique nationale du genre et le respect des quotas ».On peut aussi mentionner la Convention relative aux droits des personnes handicapées qui interdit «la discrimination fondée sur le handicap dans tout ce qui a trait à l’emploi, notamment les conditions de recrutement, le maintien dans l’emploi, l’avancement et les conditions de sécurité et d’hygiène au travail ». Lequel instrument protège également le droit des personnes handicapées à bénéficier des mêmes chances et de l’égalité de rémunération à travail égal, la sécurité et l’hygiène sur les lieux de travail, la protection contre le harcèlement et les procédures de règlement des griefs. Concernant leur protection sociale, elle est balisée par ces dispositions de l’article 21 de l’Ordonnance 93- 012 du 2 mars 1993 déterminant les règles minima : «Tout établissement public ou entreprise privée employant au moins vingt (20) salariés est tenu de réserver cinq pour cent (5%) des postes de travail à des personnes handicapées ». Mieux, l’article23 de la même ordonnance fait de cet emploi des personnes handicapées une obligation : «L’obligation d’emploi des personnes handicapées s’applique aux administrations de l’Etat, des collectivités territoriales, aux établissements privées chargées d’un service public ainsi qu’aux établissements publics quel que soit leur caractère».
Pas de discrimination à la Fonction publique
Selon Ismaila Mahamadou, directeur des recrutements et des reclassements des agents de l’Etat au ministère de la Fonction publique et de la réforme administrative, ‘’de 2011 à 2019 plus de 350 personnes handicapées, tous corps confondus, ont été recrutées à la Fonction publique. C’est vous dire que cette disposition est appliquée dans les différents recrutements qu’organise le ministère de la Fonction publique ». « Tout récemment, par exemple, pour le compte du ministère de la Santé publique, 60 médecins ont été recrutés parmi lesquels 3 personnes handicapées. C’est une exigence de la loi qui fait obligation de leur octroyer 5% du nombre demandé et nous nous plions en respectant ce texte’’, ajoute Mahamadou. Selon lui, des personnes handicapées postulent à tous les concours. «S’il arrive que le nombre de candidats dépassent les places prévues, on les met en compétition pour choisir les meilleurs. L’essentiel, le candidat doit remplir les conditions d’âge et de qualification», assure-t-il.
L’avis de la Fédération nationale des personnes souffrant de handicaps
Pour Siddo Nouhou Oumarou, président de la Fédération nationale des personnes handicapées, ce quota est respecté au niveau de la Fonction publique. « Nous avons la chance que la ministre actuelle était resté au ministère de la population. Elle connait et maitrise très bien notre situation. Chaque qu’il fois ya un recrutement, nous prenons l’arrêté pour informer nos collègues et puis nous faisons le suivi pour que ce quota soit respecté», se réjouit Oumarou. «Le problème réside au niveau du secteur privé. Comme au niveau de la Fonction publique, la loi oblige les promoteurs du privé à nous concéder les 5%. Malheureusement, cette disposition n’est pas respectée », déplore le président de la Fédération, qui constate tout de même des progrès au niveau des textes. Lesquels textes souffrent hélas d’un déficit d’application. « Concernant, par exemple, le Fonds de soutien aux personnes handicapées, la formation professionnelle, l’auto emploi et l’accès à l’éducation et la santé, le gouvernement doit redoubler d’efforts. Depuis la création en 1980 de l’école des sourds, il a fallu attendre cette année seulement pour avoir un seul bachelier».
Le regard sociologique sur la problématique
Naloti Djayouri Labiti, sociologue de son état, considère que parler des personnes handicapées au Niger pose la problématique de leur exclusion sociale. Laquelle exclusion est perceptible dans les secteurs économiques, sociaux, culturels et politiques d'où l’échec de la politique sociale de l'État qui, du point de vue sociologique, doit promouvoir le droit au travail, à l'orientation, à des conditions décentes de travail et de vie, comme prévu par les différents textes dont la constitution de la République. Cette exclusion revêt plusieurs formes. «Sur le plan social, les pesanteurs socioculturelles persistantes tendent à exposer les enfants et les femmes handicapés à des risque de protection compte tenu des perceptions négatives à leur sujet surtout sur les questions matrimoniales pour les femmes handicapées ». L’autre perception négative du handicap par une frange importante de la population, selon lui, c’est cette propension à le considérer les personnes qui en sont victimes comme des sujets de charité et non de droit, comme l'accès aux centres médicaux de la mère et de l'enfant, à la santé de reproduction aux femmes souffrant de handicap, bref l’accès aux services sociaux de base. Dans le domaine politique, Labiti déplore la méconnaissance des instruments juridiques internationaux par les personnes handicapées, une faible application desdits instruments dédiés à la promotion des droits des personnes handicapées. Du fait de cette situation, elles sont exclues des instances de la gouvernance. Pour y mettre fin, le sociologue préconise un renforcement des politiques publiques visant la promotion des personnes victimes de handicap au sein de la société. Ce qui passe inévitablement par une révision en profondeur des instruments juridiques pour les rendre plus contraignants.

Oumarou Brah Souleymane

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