Hebdomadaire Nigérien d'Analyses et d'Informations Générales

Vieille ville d’Agadez : attentat dans l’intimité du site

Des inquiétudes pèsent sur la conservation de la vieille ville d’Agadez, classée depuis 2016, au Patrimoine culturel mondial de l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO). Autour, dans, sous, sur…, la vieille ville d’Agadez subit aujourd’hui les plus terribles de violences au plus profond de son intimité.


Rien d’identique au massacre, par les terroristes, des mausolées de Tombouctou au Mali, encore moins à la violence du Daech (l’Etat islamique) sur les sites de la ville de Palmyre en Syrie. Au Niger, ce sont les populations autochtones et les structures étatiques et privées qui y participent, dans une ambiance empreinte de complicité, soit par ignorance, soit par inadvertance ou par insolence... L’identité s’effondre sous l’indifférence de tous et de chacun.
Egratignures par-ci, tortures par-là, dislocation de l’autre côté ! Le spectacle est désolant. Et ce n’est pas fini. La fête tournante du 18 décembre, célébrée en 2016 à Agadez, n’a pas apporté que nouveau visage à travers ses réalisations dans cette ville. Elle a aussi ajouté un peu au sentiment d’inquiétude quant à la conservation et le maintien en l’état de la vieille ville, conformément à l’esprit des textes de l’institution onusienne.Un dispensaire au bon milieu de la vieille ville à quelques pieds de la maison du boulanger et un second palais construit dans l’enceinte de l’ancien palais grâce à Agadez Sokni, tous en matériaux définitifs, menacent et portent atteinte à l’intégrité de la vieille ville et risquent de dénaturer ce qu’elle a de plus cher et de plus authentique.
CISP est une ONG italienne qui a fait depuis 2014 un gigantesque travail d’inventaire des monuments historiques dont le minaret d’Agadez, dénommé « L’architecture en terre au Niger, entre passé et futur ». Même si officiellement elle n’a pas sonné l’alerte, certains de ses responsables ont déploré la poussée de ce centre sanitaire construit en matériaux définitifs en pleine vieille ville qui viole l’aspect architectural du monument.
Quelques années plus tôt, beaucoup de vieux bâtiments sont tombés, sous les ruines desquels ont poussé des nouveaux comme l’Hôtel de la Paix dans le quartier Imourdan Maghass. D’autres monuments, dans d’autres parties de la Vieille ville, ont croupi sous l’effet des intempéries et de l’action de l’homme, sans jusque-là se relever. Pis, l’indifférence des populations, parfois face à la puissance de l’argent et la complexité de la question d’héritage dans cet ancien califat islamique, fait désespérer certains habitants encore soucieux qui déplorent ce carnage de notre histoire, notre identité et notre être.
À l’allure où vont les choses, rien n’augure des perspectives prometteuses quant à la conservation de ce site culturel qui fait la fierté des Nigériens. Riverain de la Maison du Boulanger, le septuagénaire Mahmoud Ag Agouzoum est remonté. « Les gens mettent du ciment un peu partout. Ce n’est même pas joli. Beaucoup de quartiers sont sales et mal entretenus », soupire-t-il, d’une voix mélancolique et nostalgique. Il déplore le manque de moyens et le don de soi de certains héritiers pour sauver ce qui peut l’être de cet héritage commun.
La folle tendance à la modernisation, caractérisée par les réalisations à la fois désordonnées et égoïstes et les initiatives de réhabilitation des maisons indépendantes prises par les propriétaires, reste la situation qui menace quotidiennement l’intégrité du site. Situation qui, si elle continue et persiste, risque de peser lourd sur la vieille ville d’Agadez dont l’inscription au Patrimoine mondial de l’UNESCO est soumise à certaines conditionnalités que le Niger est obligé de respecter.
Pour l’instant, on ne peut que se contenter des engagements pris à l’issue de l’inscription. Moussa Hamani est journaliste. Il garde encore en mémoire l’enthousiasme qui a caractérisé et suivi les moments d’inscription du site au Niger. Membre du Réseau des journalistes culturels du Niger (RJCN), il reconnaît le travail de veille que doit mener la Cellule en charge de la conservation et de la gestion de la vieille ville.

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